
Photography by Dennis Stock
Une marque littéraire faite de singularité
(Par Hella Ahmed) Et pourquoi ce poison sans façons dans du mièvre coulant et la platitude de la relance des mêmes justifications? Se justifier, c’est avouer, ou serait-ce une pêche à la consolation, comme la morsure d’un besoin viscéral, cette réclame d’un moi qui ne cesse de se dire pour tout avaler et encore et toujours se faire pardonner?
On est blanche à enterrer les vivants quand on (se délire) la mission de mater la créature pétillante de son obsession. Elle est malgré elle choisie, cette adversaire ciblée à contrôler, ce puit sans fin à vider, l’infiniment beau à fragmenter pour se remplir de ses parcelles d’identité, puis faire gicler une présence exagérée. La symphonie tournée en un silence sonore que l’on croirait pouvoir fabriquer à partir de ce qui a depuis longtemps su chanter est croyez-le bien éternelle, elle en fera de plus belles, de bien réelles. Elle charmera le ciel.
Rien de saccadé, rien de forcé! Quant à moi, ma pièce originale vient de mon sang pour se monter comme une nuit étoilée qui raconte des années lumières. Elle se tisse de mots de toutes les couleurs! Ces coquillages, mes mots, jaillissent d’un fond singulier, ce plein de mes expériences personnelles, mon intime sans leurs amertumes, mes ruines à collectionner comme dans un musée, et c’est par amour pour la femme que je suis que je ne compte que mes propres dits, que je ne compte que sur mes propres vies. Je doute, je pense et j’écris.
Être soi, c’est respecter l’autre en ne prétendant pas être lui, en n’en faisant pas un éclat à se greffer pour se faire remarquer! Je ne me voilerai pas à corrompre mon univers avec leur je ne sais quoi, j’aime ma soie. Je ne pardonne pas à qui ne respecte pas mon champ de saveurs à moi. Qu’il s’écrase au loin, je ne regarderai même pas ce que je n’aime pas. J’ai renoncé à renoncer il y a bien plus longtemps que vous ne puissiez l’imaginer. Avant la naissance de la violence sournoise, avant l’intrusion des prétentions à profusion, c’était déjà au temps des coups de bâton et de la dissociation, des cris du corps et des angoisses pâles qui revenaient en rafales, de la vertigineuse peur sale.
Je me soutiens, je me contiens, je me tiens et je me retiens, je me livre et j’écris moi-même mes livres, mes poèmes et les folles paroles d’un « je t’aime ». Je ne professe pas la lumière des dieux pour créer la peine et en faire une rengaine. Le sadisme du graphique cru, l’occasion de dire ce qui ne se dit pas en prétendant dire ce qui devrait être dit, non, merci! Devrais-je lire ou éviter ce pire? La question ne se pose même plus, je dis non et ma guerre est gagnée contre le vice, contre l’illumination théâtralisée, la redondance de ce qui n’a rien de sacré, dévoilé voilé. J’ai presque perdu de vue la littérature sous ces tristes ratures et petites signatures.
Ma guerre je l’ai gagnée contre le non-dit, car j’ai hissé mon drapeau sur mon dos, le pare-chocs de mon âme, de ma vérité, de mon unicité. La robe de mes rêves, cette lumière que j’adore porter. Je n’ai rien à envier, rien à trafiquer, c’est de mes mains que je crée, je peux mourir fière de n’avoir jamais trompé les bonnes âmes qui m’ont jadis aimée! Contre les armées d’un narcisse ressuscité, j’ai gagné, je suis celle qui a renoncé à renoncer, qui a confirmé sa marque littérature faite de singularité. En tournant le dos aux incomplets qui ont béni la honte pour prétendre, j’ai renoncé à renoncer. Leur guerre, je l’ai gagnée.

𝐒𝐨𝐮𝐬 𝐭𝐞𝐬 𝐜𝐚𝐫𝐞𝐬𝐬𝐞𝐬, 𝐇𝐞𝐥𝐥𝐚 𝐀.𝐏𝐚𝐠𝐞 𝟑𝟎, 𝐋𝐞𝐬 𝐚𝐥𝐜𝐨̂𝐯𝐞𝐬 𝐛𝐫𝐮𝐦𝐞𝐮𝐬𝐞𝐬- 𝐓𝐨𝐮𝐬 𝐝𝐫𝐨𝐢𝐭𝐬 𝐫𝐞́𝐬𝐞𝐫𝐯𝐞́𝐬, 𝟐𝟎𝟐𝟏 – Poème original écrit le 18 décembre 2020

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