Le théâtre de l’exubérance, le sens des désaveux – Par l’auteure Hella Ahmed, 13/11/2024


(Par Hella Ahmed) On voit souvent au devant de la scène, à nous faire discours sur la façon de voir la vie et de gérer nos affaires, des gens en extase face à eux-mêmes, en pleine prestation où se joue la construction d’un double de soi pour exposer, à deux, sa contradiction en tentant de nous convaincre de son absence, comme si le théâtre de leur individualité en crise de grandiosité était le problème d’une nation, enjeu crucial d’une importance capitale pour des spectateurs réquisitionnés, avalés, et des complices ricaneurs qui profitent bien du tout raté.

Quelques-uns des personnages habituels

1- Il vit comme un millionaire, c’est lui qui sait tout sur le « devenir entrepreneur fortuné », grand révélateur des recettes à profits, pourtant il croule sous les dettes et c’est grâce au travail rémunéré de ceux qui le payent pour ses conseils éclairés qu’il arrive à financer ses vêtements de marques qu’il porte si fièrement et ses voyages de luxe dont il poste les belles photos sans arrêt pour briller.

2- Même phénomène avec les psychanalystes et les religieux qui savent soigner et faire la morale aux gens alors qu’ils ne semblent pas eux-mêmes être sains d’esprit ou capables de faire la différence entre des croyances farfelues et les connaissances actuelles en matière de soins psychologiques et droits humains.

3- Les psychiatres qui veulent vous prescrire sans hésiter des médications dont l’efficacité n’a pas été prouvée et dont les effets secondaires peuvent être meurtriers sont épeurants. Ne pas accorder d’importance au risque ne semble pas très bienveillant. L’humeur n’est pas qu’une question de chimie, l’environnement hostile quand il est en cause ne changera pas avec l’administration du “médicament”, et ce n’est pas la perception d’un chacun face à ce même environnement qui pourrait tout changer dans sa vie médicamentée pour la rendre heureuse. Parfois, la sortie de secours est bien difficile à trouver, parfois on vous bloque exprès et parfois, c’est sans issue dans un monde en furie.

4- Certains se disent grands écrivains aptes à cartonner grâce à leur propre plume, alors qu’ils se gluent à une personne compétente pour copier et coller inlassablement, s’approprier le mérite de chaque idée originale capable d’éveiller l’admiration et de générer du profit.

5- Certains se disent philosophes parce qu’ils ont un doctorat ou même une simple maîtrise en philosophe, alors qu’ils ne sont pas capables de penser par eux-mêmes, ils répètent machinalement et jouent sur les mots pour condamner ce qu’il leur convient de tasser, effacer les fautes de ceux qui agressent pour juger l’erreur de celle qui se défend contre la hargne sous la façade mièvre qui s’obstine à déranger en toute impunité, bien certaine d’être protégée. Attribuer le titre de philosophe à si peu est absurde et même pas risible.

6- Du côté des autoproclamées féministes glorieuses qui nous font démonstration d’une criarde misogynie internalisée avec leur compétition déloyale par souci d’avancement sauvage, c’est encore plus désolant, car elles sont adeptes de la « sororité select ». Et n’oublions pas celles qui ramènent tout aux accouchements et à la maternité, couverture d’immunité pour se placer au dessus des femmes compétentes considérées comme adversaires qui n’ont pas enfanté, tout en clamant être du côté de la lutte pour les droits des femmes et particulièrement celui à l’avortement.

7- Et n’oublions pas non plus les sommités fabriquées, ces gens qui nous font constamment la leçon au sujet d’un leadership émotionnel ou conscient, qui ne nous concerne pas vraiment, vu qu’ils sont à des galas de VIP payés par les taxes des ordinaires ou même des réels génies exploités et oppressés. Leur sens de l’éthique bizarroïde est d’un autre type.

8- Mention spéciale aux adeptes du “rebrassage” qui vous somment la modestie pendant qu’ils mènent la belle vie grâce à votre productivité intellectuelle, entre autres. Parmi eux des mafieux, mais aussi de grands juristes qui ne connaissent rien de la propriété intellectuelle et des droits individuels lorsqu’il s’agit de vous spécialement. Leurs projets de prospérité financière, bonheur, victoires politiques et gloire sont consignés comme étant vos priorités malgré vous, car soi-disant au nom d’un “nous” à servir, ce “nous” qui ne vous inclue que pour vous utiliser et vous user.

L’illusion de la méritocratie

On oublie parfois combien c’est inutile de se mettre à nouveau dans des situations où des misogynes complexés ont un peu de pouvoir, dont la seule volonté est de vous faire sentir inférieure, non compétente et non désirée! Quand on l’a vécu 1000 fois déjà, inutile de croire que ça a changé dans certains milieux, de certaines sociétés! C’est ce genre de spécimens qui se retrouvent à des postes clés pour contrôler et rabaisser au besoin, car ça prend tout de même de la bêtise pour être bête et vindicatif face à l’intelligence qui ne baisse pas la tête comme un mouton prêt à être encore humilié après avoir naïvement pour une bonne partie de sa vie cru en la méritocratie!

La société est composée d’éléments compétents et de bonne foi et malheureusement aussi d’arrogants narcissiques qui font leur argent sans se poser des questions importantes sur le statut des femmes et le racisme (qui n’existe pas, paraît-il). Ils ont leur petit égo à satisfaire et leurs petites piques supposément blessantes à faire passer, mais il faut rester de marbre face à la petitesse et continuer à briller. Il faut se battre contre cette violence sournoise en gardant la tête haute et en évitant d’aller à la rencontre de ces prédateurs choyés comme de gros bébés qui tapent pour rigoler. 

Le sens des désaveux

Trouver de l’intérêt à cette morale d’occasion vautrée dans l’immoral qui se parade en éthique du désaffecté, ulcéreux de précieux d’usage, c’est condamner le beau au silence. Passer de l’autre côté de cette politesse macabre qui contient les faux-semblants des privilèges serait vulgaire et non socialement accepté. Voilà ce qui tue le vivant fécond du monde pour traiter la colère légitime d’erreur.

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