Tous les narcissiques sont-ils vraiment si mauvais?

(Par Hella Ahmed) Les prédateurs ne changent pas; ils s’adaptent aux situations pour sembler propres, mais nous pouvons voir clair dans leur jeu parce qu’ils l’ont déjà fait auparavant. Ils ne renouvellent pas leurs tactiques! De toute façon, certains argueront qu’utiliser le terme « narcissique » comme insulte (ou critique négative) n’est pas juste, car le narcissisme est lié à notre développement, à tous! Ainsi, ce défaut serait par défaut dans certains cas, donc pas quelque chose à dénoncer comme étant volontaire.

De plus, être narcissique ne signifie pas nécessairement que l’on est méchant ou pervers, alors qu’un pervers est nécessairement narcissique. Peut-être qu’ajouter « toxique » ou « machiavélique » clarifiera que le narcissisme ne renvoie pas intrinsèquement à quelque chose de mal.

Vulnérabilités et failles

Certaines personnes sont narcissiques de manière toxique sans intention de blesser les autres; elles sont simplement maladroites, incapables de comprendre efficacement les états internes et les besoins légitimes des autres (et peut-être les leurs également). Cependant, d’autres narcissiques peuvent être délibérément odieux car ils sont conscients de leur nature et en tirent fierté. Ils manquent d’empathie émotionnelle, mais leur empathie cognitive est assez fonctionnelle, ce qui les aide à manipuler et à blesser les autres (ils complotent en fonction de ce qu’ils savent et attendent que les autres ressentent et réagissent).

Utiliser le terme « narcissique » pour décrire un comportement égoïste ou égocentrique (comme étant représentatif de traits majeurs dans le profil de quelqu’un) ne me dérange pas. C’est juste, car tout n’est pas une question de psychanalyse ou de science, qui seraient là pour nous protéger de la pseudo-science (la psychanalyse étant elle-même une pseudoscience, quelle ironie!). Après tout, le terme « narcissisme » ne provient pas à l’origine de la psychologie ou de la psychologie populaire; il est lié au mythe de Narcisse, une histoire sur quelqu’un qui était fou de lui-même.

Quand l’abus est reconnu fièrement et répété, c’est de la perversion. Les narcissiques peuvent être un vrai calvaire car ils s’accrochent à vous et complotent pour une destruction ou une exploitation à long terme, visant à mettre fin à votre liberté et à votre bonheur. Ils deviennent obsédés.

Ils pensent pouvoir contrôler les esprits

Certains narcissiques sont si immatures et épris d’eux-mêmes qu’ils ne peuvent concevoir les gens puissent changer leur mentalité, leurs sentiments ou leur volonté en ce qui a trait à leur “persona de narcissique”. Supposons que vous ayez apprécié ou même pire adoré un narcissique autrefois mais que vous ayez ensuite mûri et commencé à éprouver du dégoût pour cette personne; il ou elle restera convaincu que ce changement de cœur est impossible et que l’adoration persiste ou peut être réaffirmée.

Certains narcissiques peuvent se persuader que la dévotion à leur égard existe, même si en réalité ce n’était jamais le cas, car ce scénario glorifiant correspond aux plans de leur ego surdimensionné et au destin qu’ils souhaitent manifester. De nombreux narcissiques voient les personnes qui les obsèdent comme des « objets vivants » dans lesquels ils peuvent insérer les « sentiments » qu’ils désirent. C’est délirant; ils vivent dans une fantaisie destructrice pour ceux qui ne veulent pas en faire partie.

Ils ne peuvent pas contrôler les esprits car certaines personnes voient rapidement à travers le brouillard des atmosphères suspectes, reconnaissant les éléments de manipulation mentale, et s’éloignent rapidement des narcissiques avides et insistants qui cherchent des frissons psychologiques pervers et des moyens d’exploiter les esprits créatifs. Quand ils blessent des personnes vulnérables, leurs fantasmes deviennent réalité, mais la plupart des narcissiques machiavéliques préfèrent cibler des individus intelligents, pour le défi et la substance mentale qu’ils peuvent extraire lorsqu’ils sont enchevêtrés avec des personnalités inspirantes. Les personnes intelligentes peuvent apprendre de leurs erreurs, devenant moins empathiques quand c’est nécessaire pour se sauver de l’emprise des narcissiques.

La chute des mondes

L’introspection est motivée par le désir d’honnêteté, mais une introspection excessive, lorsqu’elle n’est pas le symptôme d’une quête de soi insatisfaite ou qu’elle ne survient pas sans une anxiété existentielle significative, peut aussi être une performance jouée pour ceux qui veulent croire en cette représentation de dévouement extrême à ce que l’on pourrait appeler la vérité. Je crois que l’usage excessif du terme “narcissisme” par la psycho-pop peut en effet être vu pour ce qu’il est : d’un côté, une machine lucrative qui exploite le naïf, mais d’un autre côté, elle reflète ce qui se passe dans nos sociétés capitalistes. On porte une attention extrême à l’éclat extérieur, les apparences. Nous retrouvons cela non seulement du côté des matérialistes convaincus (qui souffrent peut-être aussi d’une addiction à toujours posséder davantage, où le fait d’avoir ne mène pas nécessairement à un destin paisible), mais aussi parmi les intellectuels considérés comme l’élite avec un savoir ultime (pourtant, des clans problématiques avec des défauts importants).

Les personnes qui se sentent exclues tentent de donner un sens à leur souffrance ou de l’expliquer à elles-mêmes et aux autres pour se sentir moins impuissantes face à l’injustice; elles se tournent donc vers des concepts comme le « narcissisme », qui peut se rapporter à une vision du « mal » à condamner ou à éteindre afin de revendiquer une certaine humanité qui unit. Cela serait une sorte de position morale qui peut fournir un sentiment de libération, offrant un état d’esprit apaisant, empreint d’une résistance au vice qui effraie et divise.

Conclusion

Parfois, les mégalomanes sont convaincus qu’ils sont la source de toute gloire. Incapables d’admettre que l’éclat qu’ils affichent comme étant le leur appartient à ceux qu’ils vampirisent, ils recourent à une pensée magique pour se l’approprier. Ils s’entourent de flagorneurs qui renforcent cette illusion de brilliance, alimentant leur ego tout en tirant profit de la situation. Persuadés que l’attrait des autres émane d’eux-mêmes, ils traitent ceux avec lesquels ils décident de s’enchevêtrer à tout prix comme de simples possessions.

Le mythe de Narcisse est souvent interprété comme un avertissement contre la vanité, mais dans mon article, je recentre l’analyse sur la psychologie prédatrice des mégalomanes — ceux qui ne se contentent pas de s’aimer eux-mêmes, mais dérobent l’éclat d’autrui pour gonfler leur ego. Contrairement aux lectures mettant en avant une auto-adoration passive, ma perspective explore comment les mégalomanes construisent activement une grandeur délirante en exploitant et en s’appropriant ceux qui les entourent.

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