N’être que soi pour exister à sa place avec sincérité – Par l’autrice Hella Ahmed

(Par Hella Ahmed) Dans mon essai Profils d’ombres et de lumières je me suis intéressée à l’élévation de la conscience et j’ai pensé à notre permanence dans l’existence après la métamorphose finale vers ce que j’aime personnellement nommer un « corps de vie » de résurgences de l’éternité, celle de notre décès, comme à une mémoire archivée dans le vivant transporté par le temps. L’information que nous sommes est éternelle, selon une perspective globale qui constitue pour moi le croisement des dimensions spirituelle et scientifique qui me rejoignent au plus profond de moi-même.

Mon pragmatisme n’a jamais fait de moi une personne moins sensible à la poésie de l’existence et vouloir le cultiver ne menaçait pas non plus le maintien et le développement de ma créativité artistique, bien qu’il m’ait fallu consacrer quelques années de ma vie à me recueillir dans la solitude pour réaliser avec grande certitude, avec lucidité, que la liberté que l’on se donne à valider notre ambition nous permet justement d’élargir notre perception, d’aller au-delà des carcans et des jugements réducteurs. Cette vision, quand elle est saine, nous permet de dépasser le sentiment d’échec et de combattre l’impuissance face à l’agression et l’injustice, ne serait-ce que par la distance psychologique et la réactivation ou régénérescence de l’estime de soi.

« Être libre, ce n’est pas seulement se débarrasser de ses chaînes; c’est vivre d’une façon qui respecte et renforce la liberté des autres. » Nelson Mandela

La liberté de prospérer et l’autre

Et sans en dire plus sur mon essai qui mérite d’être découvert dans le respect comme toute précieuse lecture que l’on se procure avec joie, j’ai envie de poursuivre mon idée au sujet de cette liberté que l’on se donne à voir plus grand, pour en dire qu’il peut malheureusement arriver qu’elle ne devienne que la vision des desseins de l’égo qui happe l’autre plutôt qu’un puits de lumière qui délivre des petitesses de l’existence en ouvrant les sens. La capacité d’analyse ou l’esprit de synthèse représente une qualité inestimable qui s’acquiert, bien qu’elle soit tout de même facilitée par une base spontanée qui permet son développement et sa consolidation. Elle n’est pas celle du narcissique qui bien qu’il puisse avoir des compétences intellectuelles et l’ambition de la grandeur voit son analyse écourtée par sa tendance à se mettre au centre de tout, son opinion personnelle refermant l’ouverture qu’il aura tentée, en faisant de son filtre personnel la priorité.

Alors, toute cette puissance que la capacité de s’ouvrir à de nouveaux horizons devrait procurer devient le support de limitations tranchantes au plan de l’accueil de l’autre, elle ne connaît pas ce lieu fertile où se confondent le bien et le beau, car ce n’est pas l’humain et toute sa richesse que l’on cherche à rencontrer avec sincérité et à recevoir avec amour universel, mais le retour de l’égo gonflé à travers le regard de l’autre que l’on veut capter. Ce n’est pas un dialogue que l’on recherche, mais le contact d’une substance à aspirer grâce au lien. Un lien malsain que l’on exige alors même que le refus d’être consommé et consumé est exprimé par cette extériorité à risque de se voir déshumanisée, vidée d’elle-même dans un « autre » sans fond qui s’écoutera parler longtemps pour nécroser l’expérience du vivre des autres. Le bruit est fatiguant et irritant, la parole n’est pas une perpétuelle exclamation, la moralisation vide est une grande perte de temps.

La liberté de consentir ou pas

Se sentir obligé d’être lié à qui vous transperce pour exister à travers vous, c’est comme être agressé. Cette insistance est une transgression de limites personnelles légitimes, une relation sans consentement, car elle ne profite qu’à celui qui ne conçoit que ses propres termes. Le consentement ne peut être éclairé lorsque la relation est un calvaire pour l’un et une démonstration d’abus de pouvoir pour l’autre, et malgré toutes les illusions projetées et le déni, réel ou joué, qui participe au fiasco des apparences trompeuses, cette vérité demeure l’éclairage bienveillant qui prime.

Comme on traîne un boulet, les défenseurs de l’humanité portent souvent l’envie des beaux parleurs sur le dos, car le beau attire le mauvais œil comme la foudre attire les sommets. Mandela a toujours été le sourire de mon courage, lorsque la laideur insiste à polluer mon univers et que la solitude du fécond dans mon corps et mon esprit devient une prison temporaire, ses mots sages me donnent un autre élan pour continuer à exister avec sincérité et fièrement traverser le temps.

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