Quand votre tête va plutôt bien

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(Par Hella Ahmed) Le téléphone sonne à 3 h du matin, elle décroche et entend une femme pleurer : « Pourquoi tu n’es pas venu? Je t’ai attendu trois heures, pourquoi? ».

Elle demande calmement à son conjoint qui dort d’un seul oeil :  «Chéri, est-ce que tu connais ce numéro sur l’afficheur? Une femme pleure et dit qu’elle t’attend ». «Mais non, c’est surement un mauvais numéro », répond-t-il, en faisant peu de cas de ce qui se passe. Pourtant, des messages de ce type sur le répondeur, il y en a déjà eu plusieurs. C’est une histoire récurrente.

Probablement que son cerveau ne la trompe pas, il semble qu’elle soit en couple avec quelqu’un qui la manipule en la culpabilisant et qui l’agresse psychologiquement parce que lorsqu’elle prend son courage à deux mains et qu’elle lui demande s’il a des relations extra-conjugales, il répond vigoureusement, en haussant le ton, qu’elle souffre de problèmes de santé mentale et que la jalousie et la paranoïa sont deux graves symptômes de sa maladie. Il est même prêt à lui payer une psychothérapie individuelle pour que leur couple se porte mieux, car il sait combien elle aime s’informer pour se sortir d’une détresse qu’elle n’arrive pas trop à s’expliquer après toutes ces années d’absurde.

Chris a une superbe idée pour un projet quasi avant-gardiste et il contacte une personne qu’il pense de confiance, un confident très diplômé et bien réputé, pour lui en parler. Son ami  Jacques l’écoute, charmant et sympathique comme d’habitude, puis quitte pour une réunion importante comme d’habitude. Chris tente de le contacter sur Linkedin dans les semaines qui suivent et bizarrement, il se voit bloqué. Il laisse alors tomber l’idée de faire ce grand projet en partenariat avec son ex-confident, mais quelques mois plus tard, comme par hasard, il a une conversation avec le collègue du confident qui lui parle d’un projet de grande envergure, une idée révolutionnaire sur laquelle il travaille en équipe avec l’ex-confident disparu subitement.

Tiens, ça lui dit vaguement quelque chose, ce grand projet qui va rapporter des millions, comme une impression de déjà vu. Son cerveau ne le trompe pas, il semble qu’on se soit grandement inspiré de ses talents de créatif. Mais attention, on pourra l’accuser de délirer s’il ose en parler maintenant que son projet se joue entre d’autres mains. Il devra rester zen.

Un psychanalyste, il y a vingt ans, annonce à Danielle que son enfant a des problèmes psychiques, soit des conflits inconscients à régler, car il ne répond clairement pas à son prénom et reste bien solitaire dans une posture rigide. Un autre professionnel de la même orientation annonce à Danielle, il y a sept ans, que son adolescent souffre d’anxiété, sans aller plus loin. Elle est très perplexe, elle sent que ce n’est pas tout, qu’il est possible de faire mieux. Son cerveau ne la trompait pas, le professionnel en question n’avait pas mis ses connaissances à jour et Danielle aurait du bénéficier du soutien d’une autre personne pour pouvoir soutenir adéquatement son adolescent grâce à des interventions adaptées.

Rana a des qualifications à n’en plus finir, comme elle était apparemment bien souvent sous-qualifiée puisque maintes candidatures sont restées sans réponse, elle étudia bien longtemps à l’université pour y remédier. Enfin, elle se décide à postuler à un poste intéressant après avoir soigneusement étudié le profil recherché, mais on lui répond extrêmement rapidement : «Après analyse de votre candidature, je suis au regret de vous informer qu’elle n’a pas été retenue, car vous ne répondez pas à tous les critères recherchés pour ce poste ».

Rana examina à nouveau les critères recherchés à la loupe et son cerveau ne la trompait fort probablement pas, elle correspondait au profil recherché. La réponse qu’elle avait reçue n’était simplement pas personnalisée et la candidate ne souffrait aucunement d’égo démesuré.

Rana ne se décourage pas, et comme elle doit payer ses factures, elle se présente à une entrevue pour un emploi de caissière. Durant l’entrevue, on lui demande : «Si un client vous pose une question et que vous n’avez pas la réponse, que faites-vous? ». En se référant à toutes ses années d’études universitaires et son bon sens commun, elle répond : «je demande à quelqu’un qui sait au travail pour avoir la bonne information étant donné que je suis nouvelles». Mauvaise réponse, la superviseure lui pose une autre question « Pourquoi n’essayes-tu pas de trouver toi-même la solution? ». Son cerveau ne la trompe pas, demander à quelqu’un qui sait pour transférer l’information et la garder en tête pour la suite, quand on est en formation, c’est bien trouver soi-même la solution.

Des scénarios de ce type, il peut y en avoir à n’en plus finir et dans toutes les sphères de l’existence, alors quand votre tête va plutôt bien, ne vous laissez pas impressionner, déboussoler ou décourager. Il y aura beaucoup de ces moments absurdes sur votre parcours si vous êtes quelqu’un de plutôt altruiste, gentil, ou même simplement du genre à ne pas imaginer le pire dans l’attitude du prochain. Il vous sera parfois difficile de traverser ces absurdités, mais ne vous remettez pas en doute inutilement quand votre tête va plutôt bien.

Relativiser est un art, relativiser ne signifie pas baisser la tête ou accepter l’inacceptable en tombant dans l’impuissance acquise, mais savoir innover et avoir parfois raison envers et contre tout, car «peu de choses sont impossibles à qui est assidu et compétent. Les grandes œuvres jaillissent non de la force, mais de la persévérance ». Vous vous connaissez vous-même assez, mais vous apprenez à vous connaître mieux à chaque épreuve comme à chaque réussite.

Chaque rencontre avec une personne bien intentionnée efface en partie les nombreuses rencontres teintées de manque d’empathie, de paresse, de fraude intellectuelle ou de manque de réel intérêt. Quand l’information et l’intention sont bonnes, il est impossible de ne pas le percevoir, mais quand le doute vous tenaille ou que votre intuition vous dit qu’on vous mène en bateau, c’est qu’il y a anguille sous roche.

Écoutez votre intuition quand elle vous apprend que vous n’avez ni énergie, ni temps, ni argent à perdre et qu’il vous faut réaliser vos propres rêves non ceux des autres.

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