Vous habitez ce vide qui vous reflète, hypothèse de l’essayiste Hella Ahmed

J’ai commencé à réfléchir et à écrire au sujet de la question du vide et de la plénitude en partageant mes trouvailles en 2015. J’ai publié alors une réflexion sur le partage dans les médias sociaux, le regard de l’autre et le sentiment de cohérence interne grâce à un texte avec lequel il s’agissait d’être « en accord avec soi dans ses choix ». L’hypothèse du chapitre était le résultat de ma contemplation du monde et de mes rapports personnels, de ce que j’éprouvais et de ce que j’ai découvert en y pensant. J’observais tant d’excès de démonstration de pouvoir de consommation d’un côté et autant de discours moralisateurs quant à la modération et la modestie pieuse pour sembler bon, de l’autre.

Personnellement, en faisant sincèrement de la méditation pour trouver une certaine paix, me guérir de mes peines et frustrations, j’ai compris que nous étions toujours vivants dans la pensée et que faire complètement le vide ou le remplir dans la matérialité pour se sentir entier étaient aussi bien impossibles que des stratégies vaines, car nous sommes ce vide qui nous reflète; nous sommes toujours là, quelque part dans la pensée, nous constituons cet espace qui relève de nous.Tout un chapitre de mon premier livre Déconnectés? Respirez fut consacré à cette démarche de réflexion. Un livre paru au mois de Juin 2021, qui reprend mes articles en lien avec la santé mentale et le développement personnel publiés dans différents médias depuis 2013. Des textes augmentés et enrichis par un approfondissement de l’investigation intellectuelle consacrée aux thèmes abordés.

« Faire complètement le vide, c’est impossible, vous êtes toujours là quelque part dans la pensée, vous habitez ce vide qui vous reflète. Avoir tout, pour combler le vide, c’est impossible. »

Hella, A. (2016) Être en accord avec soi dans ses choix, SantéMentalité.
Ahmed, Hella « Déconnectés? Respirez », 2021.

Plus tard, j’ai exploré autrement le sujet en y consacrant des passages de mon essai de psychologie sociale Profils d’ombres et de lumières. Je me suis intéressée à l’élévation de la conscience et j’ai pensé à notre permanence dans l’existence après la métamorphose finale vers ce que je j’aime personnellement nommer un « corps de vie » de résurgences de l’éternité, celle de notre décès, comme à une mémoire archivée dans le vivant transporté par le temps. L’information que nous sommes est éternelle, selon une perspective globale qui constitue pour moi le croisement des dimensions spirituelle et scientifique qui me rejoignent au plus profond de moi-même.

Mon pragmatisme n’a jamais fait de moi une personne moins sensible à la poésie de l’existence et vouloir le cultiver ne menaçait pas non plus le maintien et le développement de ma créativité artistique, bien qu’il m’ait fallu consacrer quelques années de ma vie à me recueillir dans la solitude pour réaliser avec grande certitude, avec lucidité, que la liberté que l’on se donne à valider notre ambition nous permet justement d’élargir notre perception, d’aller au-delà des carcans et des jugements réducteurs. Cette vision, quand elle est saine, nous permet de dépasser le sentiment d’échec et de combattre l’impuissance face à l’agression et l’injustice, ne serait-ce que par la distance psychologique et la réactivation ou régénérescence de l’estime de soi.

« L’information que nous constituons est éternelle, une mémoire archivée dans le vivant transporté à travers le temps. »

Ahmed, Hella « Profils d’ombres et de lumières », 2022.

En analysant des exemples concrets pour réfléchir à ce que l’histoire nous en a appris, je discute dans mon livre de transgressions et de manipulation. Je me consacre notamment à réfléchir de façon poussée au règne des apparences et ce que l’objectivation fait de notre rapport à nous-mêmes et à l’autre à l’ère du numérique. Le virtuel étant un champ de bataille et d’illusions sur un fond de liberté d’expression qui donne visiblement la possibilité d’appuyer la naissance et le développement de grandes révoltes menant à la validation de bien des changements de mentalité, tout en tolérant, en même temps, la micro discrimination et le racisme banalisé qui sont aussi flagrants que résistants.

« Nous sommes ce vide rempli de nous, de tout ce qui nous fait, immatériel et raconté, en silence vivant et en raison sonore, de nos désirs de nos regrets, notre chair en métaphore portée par la pensée. Nous constituons cet espace qui relève de nous. »

Dans mon prochain livre à paraître, Notre besoin de reconnaissance est profondément humain, je poursuis ma réflexion en y donnant un côté plus personnel et je laisse la dimension littéraire transporter mes mots du savoir avec une poésie qui m’est propre. Je ne peux en dire plus pour ne pas trop en dire, mais cette œuvre est une création que je m’arrache presque à moi-même tant elle me divulgue et se divulgue malgré la difficulté à faire fi d’une grande déception face à la réception méprisante de ceux qui ont avec agressivité sournoise jalousé ma fécondité intellectuelle au lieu de la reconnaître pour ce qu’elle est foncièrement et indubitablement, une richesse, et enfin réaliser que le racisme systémique ne sera jamais rien de plus que le pilier d’une violence dévastatrice, à multiples facettes.

C’est un livre qui m’ouvre de nouveaux horizons et qui confirme ma maîtrise de la langue anglaise, ma souplesse et la finesse de ma plume, car je le publie dans les deux langues alors que j’avais jusqu’à maintenant publié uniquement des articles et de la poésie en anglais, une langue qui a constitué pour moi, quand j’en ai eu terriblement besoin, une porte ouverte à me dire poète, car autrement, me raconter comme littéraire et créative avec fermeté et fierté me semblait être interdit par les affamés d’une beauté à dévorer pour exister, gardiens autoproclamés d’une langue française précieuse que l’on ne pourrait soi-disant prétendre revêtir avec grande classe lorsque l’on porte un nom coloré. Et ils n’ont affectivement pas manqué de m’encercler obsédés et insatiables dès que mon essence s’est au grand jour révélée avec une fluidité des cieux. Et je me permets à présent de me déclarer à moi-même mon amour ivre de gratitude pour ma personne, puisque notre besoin de reconnaissance est profondément humain.

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