La dépression n’est pas une identité

 

(Par Hella Ahmed) Un entourage capable d’empathie et un traitement adapté à la personne, avec son consentement éclairé, sont nécessaires au rétablissement en cas de dépression sévère, mais la réalité de la stigmatisation est atroce, car elle bloque bien des gens à l’étape du retour à la vie active.

Les jugements mal placés sont des barrières colossales à une meilleure qualité de vie. Le battant arrive à la porte de sortie, essaye de toutes ses forces d’ouvrir, mais il ne va nulle part si on s’obstine à barricader la porte de l’autre côté. 

Être stigmatisé, c’est un peu être condamné à un nouveau départ sur place quand on a assez retrouvé sa forme pour reprendre le cours d’une vie normale après une laborieuse traversée. 

La discrimination 

L’impact d’un discours qui ferait une condition éternelle de l’incapacité à être fonctionnel suite à un épisode dépressif, selon une logique de discrimination, celle de la stigmatisation, est celui d’attribuer une nouvelle identité à la personne ayant composé avec l’épreuve de la dépression. 

Elle voudrait enlever cet habit, cette fausse identité, qu’elle n’a pas choisi et qui reste collé comme une camisole de force, comme une greffe que son corps et son esprit rejettent alors qu’elle se bat pour améliorer sa qualité de vie.

On a bien trop souvent tendance à sauter rapidement aux conclusions, à l’imaginer ne pas avancer à un dit « bon rythme » dans la vie par choix  ou par manque d’initiative quand les changements ne sont pas flagrants à cause de notamment la barrière de la discrimination parmi d’autres raisons. 

Il arrive qu’on ne comprenne pas, il arrive qu’on ne veuille pas trop s’approcher pour ne pas perdre de cette précieuse énergie que l’on préfère consacrer à son propre bonheur. On ne croit pas trop que les choses peuvent changer, on veut des preuves, on est pessimiste pour l’autre tout en étant optimiste pour soi.

Pourtant, si collectivement, on n’y croit pas, le poids des conséquences malheureuses de la dépression dans nos sociétés ne fera qu’augmenter pour nous écraser, car personne ne peut réussir à être heureux et en santé en étant jugé, en étant tout bonnement seul à savoir qui il est vraiment au fond, un bon vivant. 

Une vie active 

Une vie active, dès que le corps et l’esprit disent assez oui, c’est absolument nécessaire, mais presque sortis du tunnel, on refuse du travail aux battants, et les amis d’avant ne sont pour la majorité plus là pour donner un coup de main.

La complicité et l’intimité nécessaires à une vie affective saine se retrouvent dans les relations de tous les jours, dans les amitiés, en amour, dans la collaboration et la co-création. Tant que l’on observera la dépression comme une nouvelle identité, sombre et problématique, le malaise gagnera du terrain.

Qu’on donne sa chance au coureur s’il se remet à courir, qu’on lui donne le droit de profiter de tous les possibles de la vie. Qu’on cesse de le disqualifier alors qu’il veut vivre, non survivre étiqueté alors que le rétablissement est possible.

Comment feriez-vous pour revivre si l’on vous considère comme l’ombre de vous-même alors que vous brûlez au fond de vous de retrouver la liberté ?

Vaincre la dépression est possible si on s’éloigne des jugements biaisés et des clichés pour redonner tout son sens au mot résilience. Un geste, un mot, une invitation, un emploi à niveau, une réunion entre humains, une marche vers la santé avec comme slogan la bonté, et la joie de vivre des marginalisés sera sauvée, leur présence dans le monde positivement reconnue et leurs contributions justement appréciées. 

* Si vous avez aimé ce dossier, visitez la page Facebook pour faire un like.

Copyright © Santé Mentalité inc. – Tous droits réservés – Aucune reprise de texte n’est tolérée.